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Une première étude scientifique sur la pilule anti-vieillissement

ELISABETH BURSAUX, 13 avril 2000

Un médicament « socio-bio-médical » a cette semaine les honneurs de toute la presse : la déshydroépiandrostérone, dite DHEA, molécule naturelle présentée comme souveraine contre le vieillissement. Proceedings of the national academy of sciences, une revue scientifique américaine, a publié, le 11 avril, les résultats d'un premier essai clinique montrant que ce médicament agit sur les stigmates du vieillissement que sont la perte de l'appétit sexuel, la fragilité des os, la qualité de la peau. « Le processus du vieillissement est aussi mystérieux que l'ont été pendant longtemps les mécanismes de l'hérédité ou les infections, souligne Etienne-Emile Baulieu, professeur au Collège de France et chercheur à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Vieillir relève à la fois de mécanismes intrinsèques, qui paraissent inéluctables, et de causes extrinsèques qui peuvent être compensées et aménagées. »

La recherche en gérontologie a donc beaucoup à gagner. Etienne-Emile Baulieu a montré que la synthèse par les glandes surrénales du DHEA, précurseur des hormones sexuelles et du cortisol, s'effondrait au cours du vieillissement, au point de parler d'une « surrénalopause ». Son déficit pourrait être responsable de la pénurie hormonale fréquente dans la vieillesse. Considéré comme un supplément alimentaire aux Etats-Unis, la molécule anti-vieillissement est en vente libre, en dehors des circuits pharmaceutiques. Pourquoi faire un essai clinique, alors que la molécule naturelle n'est pas brevetable et, de ce fait, attire peu les compagnies pharmaceutiques ? Etienne-Emile Baulieu croit malgré tout en l'intérêt d'une prescription sous contrôle médical car elle permettrait d'assurer la qualité du produit et d'éviter les surdosages. Il a réussi, avec Françoise Forette, professeur de gérontologie à Paris, à réunir les fonds nécessaires à la réalisation d'un vrai essai clinique et, finalement, à y intéresser un laboratoire pharmaceutique. L'article scientifique rapporte les effets d'une dose quotidienne de 50 mg administrée pendant un an à des hommes et des femmes dont l'âge est compris entre 60 et 79 ans. Les effets bénéfiques les plus spectaculaires ont été observés sur le réveil de la libido des femmes âgées de 70 à 79 ans, mais aussi, toujours chez les femmes, sur les os et la peau. « L'amélioration de l'état de la peau concerne la réhydratation, sa lubrification et sa couleur, par éclaircissement du teint jaunâtre des vieilles dames, affirme-t-il. L'imagerie osseuse montre une diminution de la dégradation osseuse et une augmentation de la densité de l'os au niveau de la hanche et du poignet. »

Vérifier sur le long terme

Il reste à vérifier sur le long terme une éventuelle réduction des risques de fractures. En revanche, aucun effet significatif, ni indésirable, n'a été noté chez les hommes. « Nous avons fait appel à des volontaires pour participer à cet essai et avons sélectionné les personnes en bonne santé, ajoute Etienne-Emile Baulieu. La très bonne condition physique des participants à l'essai a sans doute diminué l'effet visible du médicament. Nous ne cherchons pas à faire des surhommes ou des superfemmes, mais seulement à maintenir les gens en bonne forme malgré la prise d'âge. C'est ce que nous avons obtenu chez les femmes âgées de plus de 70 ans, nous aimerions maintenant tester cette molécule chez les personnes de plus de 80 ans. » Pour fêter ces résultats somme toute assez réjouissants, tous les volontaires de l'essai thérapeutique sont conviés à faire la fête à la Maison de la Mutualité le 13 avril.