source : http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/biographies/IVRepublique/lafay-bernard-08091905.asp
Bernard LAFAY
Né le 8 septembre 1905 à Malakoff (Seine)
Décédé le 13 février 1977 à Paris
Conseiller de la République élu par l'Assemblée nationale de 1946 à 1948, puis élu de la Seine de 1948 à 1951
Député de la Seine de 1951 à 1958
Secrétaire d'Etat à la présidence du Conseil du 20 janvier au 8 mars 1952
Secrétaire d'Etat aux affaires économiques du 2 juillet 1953 au 19 juin 1954
Ministre de la Santé publique et de la population du 23 février 1955 au 1er février 1956
Fils du docteur Philippe Lafay, Bernard Lafay suit ses études secondaires au lycée Buffon et accomplit un double cursus universitaire médical et scientifique. Titulaire de deux doctorats, il exerce comme médecin généraliste à partir de 1931 dans l'Ouest parisien. Ses travaux sont remarqués par les académies de médecine et des sciences. Mobilisé en 1939 comme médecin officier d'une unité de chars, son courage au feu pour sauver les blessés lui vaut d'être cinq fois cité à l'ordre de l'armée et décoré de la Légion d'honneur par le général Weygand en juin 1940.
Revenu à ses activités médicales dans le Paris de l'occupation, il tient tête comme membre du Conseil de l'Ordre aux autorités allemandes. Il dispense de nombreux jeunes gens du STO et participe aux combats parisiens de la Libération. Ces titres de résistance lui valent d'être félicité par le général de Gaulle et d'être désigné comme membre de la nouvelle administration provisoire de la capitale. Il est élu conseiller municipal de Paris le 29 avril 1945 et réélu le 26 octobre 1947. Car c'est tout naturellement qu'il s'est tourné vers les mandats électifs, sous la bannière du parti radical auquel il avait appartenu avant-guerre dans la formation des Jeunesses radicales. Se réclamant des cautions d'Edouard Herriot et du général de Gaulle qu'il ne juge pas incompatibles, il tente sa chance comme candidat aux deux assemblées Constituantes à Paris et de nouveau à l'Assemblée nationale, le 10 novembre 1946, dans le Tarn. Ces premières candidatures à des élections nationales se révèlent décevantes. Bernard Lafay pâtit du discrédit qui, après la guerre, pèse sur le radicalisme, ainsi que d'une trop faible notoriété dans le département du Tarn où sa liste "d'Union tarnaise" du RGR n'obtient que 18 075 voix sur 147 140 suffrages exprimés.
C'est donc comme secrétaire général administratif du Parti radical qu'il entre au Conseil de la République en décembre 1946, élu par l'Assemblée nationale au titre de l'article 20 de la loi du 27 octobre qui autorise cette dernière à désigner 50 membres du Conseil de la République dont 35 à la proportionnelle des groupes. Vice-président puis président de la Commission de la famille, de la population et de la santé publique, membre aussi de la Commission de la défense nationale, Bernard Lafay se montre d'emblée un parlementaire actif, intervenant fréquemment dans les débats législatifs, déposant de nombreuses propositions de lois et de résolutions. Peu favorable aux nationalisations comme à toute forme de dirigisme, il centre ses interventions sur les questions de santé, de sécurité sociale, de logement et d'aide aux personnes âgées. Sur un terrain plus politique, il invite le gouvernement, le 14 juin 1949, à déposer un projet de loi accordant une large amnistie aux personnes condamnées pour fait de collaboration économique. Il intervient aussi, ponctuellement, dans les problèmes de défense nationale.
Bernard Lafay se présente à Paris aux élections législatives du 17 juin 1951, à la tête d'une liste présentée par le RGR et le Parti radical. Avec 80 000 voix de moyenne de liste et 19,2 % des suffrages exprimés, il est élu dans la deuxième circonscription de la Seine (Paris centre et ouest), ainsi que son colistier Pierre de Léotard. Il est désigné aux Commissions de la famille et de la santé publique, du travail et de la sécurité sociale et de la reconstruction. Ses interventions et propositions, toujours fort nombreuses, demeurent limitées aux questions sanitaires, sociales et fiscales. Ses positions politiques se situent au centre droit. Il vote les lois Marie et Barangé, l'investiture d'Edgar Faure, d'Antoine Pinay et de Joseph Laniel. Il est brièvement secrétaire d'Etat à la présidence du Conseil, chargé de la fonction publique dans le premier gouvernement d'Edgar Faure, puis secrétaire d'Etat aux affaires économiques dans le cabinet Laniel, où il est plus particulièrement chargé de l'organisation des marchés agricoles. A ce titre, il doit affronter de nombreux amendements et interpellations sur le marché de la viande notamment.
Après avoir soutenu de ses votes l'expérience Mendès France et fait preuve d'opinions favorables à la construction européenne (il comptait en effet parmi les "cédistes" du Parti radical), il est appelé de nouveau par Edgar Faure en février 1955, en raison de l'estime personnelle que lui porte le nouveau président du Conseil et de leurs affinités politiques. Il reçoit cette fois un ministère à part entière et mieux taillé à sa mesure, celui de la santé publique et de la population. Comme tel, il est l'auteur de la loi rendant obligatoire la vaccination par le BCG, il amorce une réforme hospitalière et crée la première banque des yeux. A l'Assemblée, ses interventions sont consacrées à la lutte contre l'alcoolisme. Il doit déployer un certain talent procédurier pour déjouer les offensives d'un lobby de l'alcool particulièrement zélé.
Aux élections législatives du 2 janvier 1956, Bernard Lafay est reconduit à la tête d'une liste RGR et réélu, ainsi que Pierre de Léotard, avec un progrès en voix et un léger tassement en pourcentage des suffrages exprimés (17,9 % au lieu de 19,2 % en 1951). Bien qu'appartenant à la tendance "fauriste" du radicalisme, en principe hostile au Front républicain, il vote l'investiture de Guy Mollet le 31 janvier et soutient son gouvernement de ses votes (pouvoirs spéciaux, politique algérienne, ratification des traités de Rome). il retrouve sa place dans les mêmes commissions que précédemment. Tout en continuant de multiplier des propositions à caractère sanitaire ou social, ses interventions dans l'hémicycle se font plus politiques. Sur la question algérienne, il épouse des positions résolument "Algérie française" (séance du 2 juin 1956) qui le conduisent à déplorer l'insuffisance des moyens de la police parisienne face à la vague d'attentats FLN dont elle est la cible, notamment lors de la séance du 25 janvier 1958. Pour autant, il ne vote pas la chute du gouvernement Mollet en juin 1957 et vote les investitures de Maurice Bourgès-Maunoury et de Félix Gaillard, ainsi que les divers projets de loi-cadre de l'Algérie. De même, il se prononce pour la ratification des traités de Rome. Son hostilité à toute perspective de négociation avec les rebelles algériens le conduit à refuser sa confiance au gouvernement Pflimlin le 13 mai 1958. De façon contradictoire, il refuse ensuite de voter la résolution tendant à réviser la Constitution le 27 mai, mais vote l'investiture du général de Gaulle le 1er et les pleins pouvoirs le lendemain.
Personnalité importante du milieu parlementaire de la Quatrième République, Bernard Lafay va poursuivre après 1958 une brillante carrière politique et municipale. Sans doute est-il battu, d'assez peu, aux élections de novembre 1958, par le candidat UNR dans la 23e circonscription de Paris (partie du XVIIe arrondissement). Mais il retrouve le Palais du Luxembourg en 1959 et l'Assemblée nationale en 1967. De 1969 à 1972, il a été secrétaire d'Etat auprès du ministre du développement industriel et scientifique dans le gouvernement Chaban-Delmas.
Membre du Conseil national de l'Ordre des médecins, membre de l'Académie de médecine depuis 1956, titulaire de nombreuses décorations, Bernard Lafay est également l'auteur de divers ouvrages de vulgarisation. De 1944 à sa mort, survenue le 13 février 1977, il n'a cessé de siéger au conseil municipal de Paris, dont il a été le Président en 1975, consacrant à la gestion de la capitale le meilleur de son activité publique.