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Alain-Jacques Valleron

Alain-Jacques Valleron est né le 24 août 1943 à Neuilly-sur-Seine. Il a mené ses études secondaires aux lycées Montaigne et Louis-le-Grand à Paris, et ses études supérieures à l'École polytechnique (promotion 1963) et à la faculté des sciences de Paris. En 1966, à sa sortie de l'Ecole polytechnique, Alain-Jacques Valleron rejoint l'unité Inserm 21 de recherches statistiques, dirigée par Daniel Schwartz. Il commence à y travailler avec Philippe Lazar. Il entame ensuite avec Eveline Eschwege des travaux sur l'épidémiologie du diabète de type II, en collaboration avec Gabriel Rosselin, directeur de l'unité 55 « Diabétologie et études radio-immunologiques des hormones protéiques » à Saint-Antoine. Il utilise alors intensivement ce que l'on appelle aujourd'hui les méthodes de « Data Mining » qui permettent d'extraire l'information sous-jacente contenue dans les grandes bases de données épidémiologiques, documentant un grand nombre d'explorations biologiques et cliniques.

A la suite d'une série d'analyses statistiques effectuées avec des chercheurs cancérologues de l'Institut Gustave Roussy à Villejuif, va se construire le thème principal de la première partie de la carrière de recherche d'Alain-Jacques Valleron : la modélisation du cycle et de la cinétique cellulaires. Il travaille en collaboration étroite avec les chercheurs de l'unité 66 de l'Inserm « Radiobiologie clinique », notamment avec Emilia Frindel, et sous la direction de Maurice Tubiana, directeur de cette unité. Ses recherches vont permettre notamment la construction d'une plate-forme de logiciels de simulation événementielle (comme on les appelle aujourd'hui et que la puissance de calcul des ordinateurs a permis de populariser, en particulier dans la modélisation des épidémies). En s'appuyant sur cette plate-forme, il développe des modèles mathématiques généraux d'interprétation des données expérimentales auto-radiographiques de mesure de la durée du cycle et de la cinétique des populations cellulaires. Il peut ainsi cartographier la variabilité des phases du cycle dans de nombreux systèmes expérimentaux (in vivo et in vitro) et humains. Parallèlement, il développe des méthodes originales de mesure de la phase G2 du cycle cellulaire, du coefficient de prolifération des tumeurs et de la cinétique des cellules clonogéniques (« souche ») de tumeurs expérimentales.

Par la suite, ses travaux vont concerner, de façon générale, la modélisation de la croissance tumorale et, finalement, vont retrouver l'épidémiologie, lorsque la modélisation des paramètres de la cinétique cellulaire et de la croissance tumorale permet d'évaluer le bénéfice du dépistage précoce du cancer du sein. Réciproquement, il utilise des approches épidémiologiques pour construire et analyser des expériences de biologie cellulaire : la micro-cinématographie de dizaines de milliers de cellules effectuée par M. Collyn d'Hooghe a été le support permettant de constituer des fichiers « épidémiologiques cellulaires » et de fournir ainsi des informations sur le déterminisme de la mitose, à partir de l'étude des corrélations entre cellules sœurs ou entre cellules mères et filles calculées sur ces grands nombres de pedigrees. Dans les années 1970, l'usage de la statistique, de la modélisation et de l'informatique était peu répandu dans le champ des sciences de la vie et, souvent, la recherche y était mal identifiée. Les contacts entre mathématiciens « professionnels » et chercheurs biomédicaux étaient peu nombreux. Aussi, Alain-Jacques Valleron crée, en 1972, un laboratoire universitaire de biostatistiques (le nom n'était pas répandu à l'époque en France) à l'université Paris VII, puis un DEA de biomathématiques, premier DEA de cette discipline en France. Il va former ainsi des centaines d'étudiants dont beaucoup occuperont par la suite des fonctions de responsabilités à l'Inserm (plusieurs directeurs d'unités), dans les universités ou dans des entreprises.

En 1981, Alain-Jacques Valleron crée sa première unité de recherche Inserm, l'unité 263, intitulée « Biomathématiques et biostatistiques », avec un programme de recherche affichant la modélisation des maladies transmissibles, à une époque où l'intérêt pour celles-ci était en forte perte de vitesse, tant le problème des maladies infectieuses semblait alors quasi réglé. Sa conviction de départ était qu'il fallait renforcer, voire créer, car elle était souvent absente ou de mauvaise qualité, l'« observation » et la modélisation épidémiologique des maladies infectieuses, en utilisant les moyens innovants que l'« informatique distribuée » permettait et qui ont été, quelques dix ans plus tard, popularisés grâce à Internet. La première contribution majeure de l'unité dans ce domaine a été la création, avec le soutien conjoint du directeur général de l'Inserm, Philippe Lazar, et du directeur général de la santé, Jean-François Girard, du réseau national télé-informatique de surveillance des informations sur les maladies transmissibles. Vingt quatre ans après, la composante la plus originale de ce réseau (à savoir, le réseau sentinelle) continue dans l'unité de recherche Inserm 707 « Epidémiologie, systèmes d'information, modélisation », avec la collecte et l'analyse des données épidémiologiques en temps réel. Ainsi, sont obtenues des données « massives » qui n'existaient pas sur les maladies transmissibles fréquentes telle la grippe, les maladies de l'enfant tels la rougeole, les oreillons, etc... et d'autres maladies comme les diarrhée aiguës, les hépatites virales...). L'innovation technologique réside dans le fait d'avoir développé un système tout informatique de recueil, d'analyse et de diffusion de l'information.

L'unité 263 d'Alain-Jacques Valleron a d'abord eu recours au minitel pour capturer cette information épidémiologique en temps réel, avec la participation de médecins volontaires (environ 2 000 ont collaboré à ce système). Des algorithmes puissants de détection des épidémies et de prévisions épidémiologiques ont également été continuellement développés. Les données recueillies (plusieurs centaines de milliers) sont devenues les plus importantes au monde pour les différentes maladies étudiées.
Ce choix des maladies infectieuses, en 1981, s'est avéré d'autant plus pertinent que l'épidémie de sida, détectée peu après, en a remis au premier plan l'épidémiologie. Dès son début, l'unité s'est mobilisée sur ce sujet (l'équipe d'Alain-Jacques Valleron a été l'une des premières à publier les estimations de la durée d'incubation du sida). Celui-ci va alors investir une grande partie de ses efforts pour convaincre de la nécessité de créer une base de données nationale de suivi systématique des sujets séropositifs au VIH.
Un centre collaborateur de données sur l'épidémiologie de l'immunodéficience humaine a alors été créé à cette fin en 1988 et labellisé en tant que service commun 4 de l'Inserm. Les activités de ce centre se poursuivent au sein de l'unité de recherche 720 « Epidémiologie clinique et traitement de l'infection à VIH », dirigée par Dominique Costagliola et ont permis, avec une file active ayant inclus plus de 110 000 patients depuis le début, de fournir des données observationnelles sur l'évolution des résultats aux nouveaux traitements, sur leurs effets indésirables et sur les facteurs de risque de la morbidité sévère non-sida (maladies cardiovasculaires et cancers, en particulier).

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Inserm actualités n°92, janvier 1991
Unité de recherche Inserm 263 « Biomathémathiques
et biostatistiques »
Directeur : Alain-Jacques Valleron

Objectif scientifique général de l'unité
L'unité a pour objectif de mettre en oeuvre des approches intégrées (du niveau moléculaire au niveau populationnel) utilisant et développant les techniques modernes du traitement de l'information en biomédecine (reconnaissance des formes, analyse d'images, modélisation, intelligence artificielle, analyse de qualité et procédure d'audit, téléinformatique), dans le but de fournir des résultats d'application immédiate dans les domaines de l'épidémiologie et de la santé publique et de participer à la mise au point et à la découverte de nouvelles méthodologies du traitement de l'information des sciences de la vie.
L'unité est insérée dans le «Centre de recherches de bioinformatique» de Paris VII qui regroupe en outre le groupe de formation doctorale en biomathématiques, le service commun 4 de I'Inserm, centre coopérateur de données sur l'épidémiologie de l'immunodéficience humaine, dirigé par Dominique Costagliola. L'effectif de l'unité est actuellement de l'ordre d'une cinquantaine de personnes.
Modélisation
Les équipes de l'unité «modélisent» à tous les niveaux d'organisation, depuis le niveau populationnel (épidémiologique) jusqu'au niveau moléculaire.
En épidémiologie, les recherches utilisant la modélisation concernent avant tout le sida. L'épidémiologie du sida dépend, en effet, de paramètres «cachés», qu'il est impossible ou difficile de mesurer directement dans des enquêtes épidémiologiques, mais qu'on peut, en revanche, estimer grâce à la modélisation. L'unité a, en particulier, contribué à l'estimation de la durée d'incubation du sida. Elle développe également des méthodes de modélisation de la dynamique de l'épidémie et, plus récemment, dans le cadre d'une action concertée de I'Agence nationale de recherche sur le sida (Anrs), d'estimation par «rétro-calcul» du nombre de sujets séropositifs en France, la conclusion étant que ce nombre était compris entre 100 000 et 200 000). La modélisation est également utilisée pour estimer l'impact du délai de séroconversion sur la sécurité des banques du sang.
Viennent ensuite les recherches menées par l'unité dans les domaines de la pharmacocinétique. Sur le plan des applications, ces études concernent l'hypertension. Sur le plan des méthodes, elles ont mené à des techniques de localisation des paramètres des modèles compartimentaux applicables dans les cas où les mesures disponibles sont très peu nombreuses.
Au niveau de la biologie cellulaire, les recherches en modélisation concernent le développement d'algorithmes d'analyse d'images. En analyse 2D, cela concerne notamment l'analyse caryométrique du foie, l'analyse des alvéoles pulmonaires, l'analyse de la synthèse protéique à l'aide de la technique des plaques d'hémolyse... Dans ce cadre, des recherches méthodologiques concernent la géométrie fractale. En microscopie 3D, les recherches concernent principalement, depuis 1988, la mise au point, en microscopie par faisceau laser confocal, de méthodologies d'acquisition d'images 3D en réflectance et en fluorescence à une, puis à deux longueurs d'onde en parallèle (qui a permis, notamment, l'étude de la répartition spatiale des filaments intermédiaires du cytosquelette cellulaire au cours de l'ontogenèse du foie de rat).
Au niveau moléculaire, l'unité développe des techniques de modélisation appliquées à la construction d'arbres phylogénétiques (avec, comme application, par exemple, la construction de généalogies du chromosome Y) et à la cartographie du génôme (avec, par exemple, un travail visant à la localisation du gène de la mucoviscidose).

Bioinformatique
Ce néologisme recouvre à la fois l'informatique médicale, l'informatique appliquée à la biologie et la recherche informatique s'appuyant sur des «modèles biologiques» (dont l'exemple le plus connu est celui des réseaux neuronaux).
En informatique médicale, le projet le plus important est le «réseau national téléinformatique de surveillance et d'information sur les maladies transmissibles». Développé depuis 1984 sur une initiative commune Inserm-Direction générale de la santé (DGS), il avait pour but initial d'utiliser les ressources de ia téléinformatique pour aller chercher les données là où elles sont (y compris chez les médecins généralistes), permettre leur analyse et leur redistribution en temps réel. Ce réseau associe notamment 500 médecins sentinelles répartis sur tout le territoire qui communiquent 24h/24 (depuis maintenant six ans) des observations épidémiologiques sur un certain nombre de maladies sélectionnées en accord avec la DGS. Le réseau a permis d'acquérir des données uniques, soit par leur taille (plus de 120 000 syndromes grippaux décrits individuellement), soit par leur nature. D'autres actions sont développées également en informatique médicale, telle la mise en place de SIAD (système interactif d'aide à la décision) en santé animale (avec le Centre national d'études vétérinaires et animales – CNEVA - de Maisons-Alfort) ou en santé humaine.
En informatique appliquée à la biologie, les études portent notamment sur la mise au point d'interpréteurs de séquences nucléotidiques et peptidiques, incluant recherche de séquences consensus, segmentation automatique des profils de variabilités en zones homogènes. L'unité travaille également à la construction d'un «simulateur moléculaire» interactif de protéines, en s'attachant en priorité à la détermination des chaînes latérales d'une protéine lorsque la chaîne principale est fixée spatialement et à la déformation de la chaîne principale sous l'action de forces.
En informatique orientée par des modèles biologiques, c'est la technique d' «algorithmes génétiques» (opérant par «sélection», «mutation» sur les codes des programmes) qui est appliquée à la cartographie du génome.

Epidémiologie
Un premier volet de recherches porte sur le développement de classifications histopathologiques objectives, reproductibles et corrélées au pronostic. Ces études concernent le cancer de la prostate, les leucémies et la réaction du greffon contre l'hôte. Les travaux effectués ont en commun l'utilisation de l'analyse d'images par ordinateur permettant la mesure d'un grand nombre de paramètres quantitatifs ou la recherche de paramètres morphométriques corrélés de façon reproductible au degré de gravité de chaque type de pathologie pour tenter de définir des classifications pronostiques, sachant que tout l'effort est mis sur l'acquisition de données épidémiologiques prospectives et non pas seulement transversales.
Un second volet de recherches porte sur les maladies transmissibles et sur le sida. Dans le domaine du sida, l'unité s'intéresse à l'histoire naturelle de l'infection et à sa redéfinition depuis que l'on intervient précocement par des traitements. Elle s'intéresse aussi, grâce au réseau de médecins sentinelles, à la caractérisation des sujets nouvellement dépistés, à l'attitude du généraliste face aux malades et à l'évaluation du coût de suivi du patient asymptomatique. Enfin, elle est responsable, pour la France, d'une grande enquête comparative initiée par PROJECT HOPE, aux Etats-Unis, sur les connaissances, attitudes et comportements vis-à-vis du sida aux Etats-Unis, en Grande Bretagne et en France.
Un troisième volet de recherches épidémiologiques concerne l'hématocancérologie : ainsi, l'unité est centre d'un réseau de recherche en santé publique concernant I'«aplasie médullaire», avec la participation de 85 centres hospitaliers. Cela a fourni d'une part une épidémiologie descriptive de cette maladie, d'autre part le support d'une enquête cas-témoins visant à l'étude des facteurs de risque, notamment médicamenteux, et d'exposition professionnelle de cette maladie où une très grande majorité des cas est idiopathique.
Enfin, des recherches épidémiologiques collaboratives sont menées dans le domaine de la gastro-entérologie où l'unité participe à différents travaux (notamment en matière d'essais thérapeutiques) concernant la maladie de Crohn et dans le domaine de l'hypertension artérielle où l'unité collabore à la définition de profils de référence de la pression artérielle ambulatoire.

Collaborations internationales
L'unité entretient des collaborations suivies avec différents groupes nord américains et européens. Ainsi, un projet européen (Eurograde) associant huit pays européens dans le domaine de la classification histopathologique des cancers est piloté par l'unité. Un programme franco-espagnol concernant la surveillance épidémiologique est en cours de développement dans le cadre d'un réseau Inserm et l'un des chercheurs de l'unité est mis à la disposition du ministère de la santé du Chili pour opérer un transfert de la compétence acquise dans le réseau national téléinformatique de surveillance et d'information sur les maladies transmissibles.
Un effort important est fait dans le développement de collaborations avec les pays en voie de développement, notamment en matière de formation. Parmi ces activités, une action soutenue par l'OMS et entrant dans le cadre d'un réseau Nord-Sud Inserm, concerne le «traitement et l'épidémiologie de la diarrhée de l'enfant dans les pays en développement», incluant trois équipes françaises et huit centres hospitaliers de pays africains, dont les essais cliniques sur cette pathologie sont soutenus par l'OMS est coordonnée par l'unité.

Enseignement
Les responsabilités d'enseignement de l'unité s'étendent aux trois cycles d'enseignement et à la formation permanente et continue. C'est le troisième cycle de biomathématiques qui concerne le plus l'Inserm. Créé par l'unité en 1980, il est le seul enseignement habilité sous cet intitulé en France et il a déjà formé une quinzaine de chercheurs Inserm de la discipline.

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En 1995, l'ensemble des activités de recherche du groupe d'Alain-Jacques Valleron a été localisé à la faculté de médecine de Saint-Antoine, dans une nouvelle unité de recherche, l'unité 444 « Épidémiologie et sciences de l'information » qu'il y a dirigée jusqu'en 2004 et depuis, dans l'unité 707 « Epidémiologie, systèmes d'Information, et modélisation), dirigée par Guy Thomas. Les recherches ont permis de mettre au point des systèmes puissants de détection et de prévision des épidémies et des modèles d'évaluation in silicio de mesures de santé publique destinées à les contrôler. Les applications ont concerné en particulier la grippe, mais également le SARS, l'hépatite virale C, la maladie de Creutzfeldt-Jakob et une maladie non transmissible, le mésothéliome. Alain-Jacques Valleron s'intéresse actuellement, avec Pierre Bougnères (unité 561 « Immunologie, génétique et traitement des maladies métaboliques et du diabète »), à l'analyse intégrée à haut débit de données génomiques et environnementales relatives à certaines maladies multifactorielles, notamment le diabète de type 1.

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Inserm actualités n°149, décembre 1996
Unité de recherche Inserm 444 « Epidémiologie et sciences de l'information »
Directeur : Alain-Jacques Valleron

L'unité est située à la faculté de médecine Saint-Antoine (université Pierre et Marie Curie) où la majorité de ses personnels est logée. En attente de locaux définitifs, l'activité de recherche est également menée pour partie dans les locaux de l'hôpital Saint-Louis (AP-HP) et dans ceux du campus de Jussieu (université Denis Diderot). Le laboratoire est composé de six chercheurs Inserm, huit enseignants-chercheurs, six allocataires de recherche et deux autres boursiers de thèse. Le mouvement associatif fournit un support important aux activités du groupe puisque sept personnes relèvent de celui-ci, dont le responsable du centre de calcul. Le travail est mené en étroite symbiose avec le service commun 4 de l'Inserm « Centre coopérateur de données épidémiologiques sur l'immunodéficience humaine », dirigé par Dominique Costagliola, avec lequel est partagé le centre de calcul et est développée une activité très importante de formation, non seulement des étudiants de troisième cycle, mais aussi des plus jeunes, voire des très jeunes.
Enfin, l'unité est constitutive de l'Institut fédératif de recherche «Institut Saint-Antoine de recherches sur la santé», associant Inserm, AP-HP, niversité Pierre et Marie Curie, et Institut national de la transfusion sanguine.
Le programme général de recherche
L'unité a un double objectif : appliqué, en visant à acquérir des connaissances épidémiologiques, en priorité dans le domaine des maladies transmissibles, et méthodologique, en visant à développer de nouvelles méthodes d'acquisition, de traitement ou de redistribution de l'information ; les applications concernent l'épidémiologie de la population générale et l'étude (en vue de sa maîtrise) du risque iatrogène. Outre les maladies transmissibles, l'unité a également une activité notable dans le domaine du cancer, notamment, en hémato-cancérologie, en hépato-gastroentérologie et en épidémiologie environnementale, où elle s'intéresse à la modélisation des effets éventuels des cancérigènes à faible dose ; la recherche méthodologique concerne les systèmes d'alerte, la modélisation des données répétées et l'analyse de séries temporelles déterministes et/ou stochastiques.

Epidémiologie « en population générale »
Grâce à la modélisation, nous évaluons des paramètres épidémiologiques inaccessibles à l'observation directe, parce qu'ils concernent le futur (prévisions), parce qu'ils concernent des situations imaginaires (études de scénarios). Grâce à la téléinformatique, nous acquérons et traitons des informations recueillies en médecine libérale. Nos travaux de prévision ont, notamment, concerné l'infection par le VIH. Pour évaluer les nombres actuels de séropositifs et prévoir l'évolution de l'épidémie, des modèles d'histoire naturelle ont été nécessaires. Ainsi, nous avons évalué la durée d'incubation, caractérisé le moment de contamination in utero (grâce à une collaboration avec l'équipe responsable de la cohorte mère-enfant, notamment, le service de virologie de l'hôpital Necker) et nous modélisons maintenant l'interaction virus - système immunitaire sous l'effet du traitement. La modélisation permet aussi de tester des scénarios, en particulier relatifs à des modifications (hypothétiques) de comportement. Le même chemin se fait en ce qui concerne l'infection par le VHC, où les prévisions relatives à la mortalité par hépatocarcinome nécessitent la mise en place d'un modèle d'histoire naturelle de l'infection par celui-ci.
Une partie importante de notre activité concerne l'épidémiologie des maladies transmissibles « fréquentes et peu graves », le qualificatif «peu grave» étant vu par comparaison avec les maladies cardiovasculaires, le cancer, ... Notre collaboration, depuis 1978, avec le laboratoire de Distributed Machine Intelligence d'UCLA (Etats-Unis) nous avait convaincus que le développement de la technologie des réseaux allait permettre une « télé-épidémiologie», en optimisant le circuit recueil-analyse-rediffusion de l'information, sans se préoccuper des contraintes de temps et surtout d'espace. Nous avons développé le «Réseau sentinelles» dans le cadre d'une convention pluriannuelle avec la Direction générale de la santé (DGS), depuis 1983, ainsi qu'avec le Réseau national de santé publique (RNSP) depuis 1993. Ce réseau s'appuie sur environ 500 médecins sentinelles qui décrivent leurs cas de huit pathologies transmissibles fréquentes. Ce système a d'abord été conçu comme un nouvel outil de surveillance épidémiologique concernant des maladies pour lesquelles on manquait d'informations. Mais, il est devenu un outil de recherche en tant que plate-forme supportant des protocoles spécifiques dans les domaines de l'évaluation du diagnostic ou du traitement de ces maladies. Certaines bases de données obtenues sont, en effet, uniques, telle celle concernant les syndromes grippaux (descriptions individuelles de plus de 200 000 cas).

Risque iatrogène
Nous incluons dans ce thème nos recherches concernant l'épidémiologie des infections nosocomiales par bactéries multi-résistantes. Pour leur plus grande part, celles-ci font appel aux techniques de l'épidémiologie clinique et sont déveIoppées dans le cadre de collaborations, en général soutenues par le Programme hospitalier de recherche clinique (PHRC). Mais ces recherches utilisent aussi la modélisation : ainsi, nous développons un simulateur permettant de représenter la diffusion de bactéries multi-résistantes, en fonction des différents paramètres de cette diffusion. Un tel modèle permet de simuler des politiques de prévention qui ne peuvent être testées sur le terrain (ou dont le test nécessite des essais thérapeutiques longs, coûteux et de faible rapport coût/efficacité). Il peut aussi servir de système d'enseignement assisté par ordinateur. L'industrie des hautes technologies, en particulier l'aéronautique, a, depuis longtemps, réfléchi à la sécurité des processus de production complexes (i.e. multi-acteurs et multi-étapes). Une partie de nos recherches vise à modéliser de tels processus, afin d'identifier les maillons faibles et de les renforcer. Cela concerne la transfusion (maîtrise du risque immunologique, en collaboration avec l'Institut national de transfusion sanguine) et l'anesthésie (dans le cadre d'un Programme assurance qualité, en collaboration avec le service d'anesthésie-réanimation de l'hôpital Tenon).
Ce travail engendre des activités de valorisation importante dans le domaine de l'aide à l'accréditation et à la certification. L'unité a, en effet, une expérience de plusieurs années sur ce sujet, acquise à travers une collaboration avec le Centre national d'études vétérinaires et animales et la Direction générale de l'alimentation, ce qui a permis de réaliser un système « intelligent » d'aide à l'accréditation des laboratoires d'analyse alimentaire. L'activité concerne maintenant l'hôpital, avec un projet pilote en exploration fonctionnelle respiratoire, dans le cadre d'un programme assurance-qualité obtenu en collaboration avec l'hôpital Saint-Antoine.

Recherches méthodologiques sur les systèmes dynamiques
Nos recherches à finalité épidémiologique engendrent une recherche méthodologique : développement de systèmes de simulation de cas cliniques, modèles de simulation événementielle de diffusions épidémiques, etc. Mais, plus spécifiquement, nous développons trois thèmes de recherche « théorique » :
• la modélisation neuromimétique de l'alerte : l'idée de base est de modéliser les réseaux neuronaux biologiques permettant l'alerte dans la nature et de déboucher sur des réseaux neuronaux formels aptes à détecter efficacement la nouveauté ;
• l'analyse des données répétées, telles celles qu'on observe au cours du temps au long de l'histoire naturelle d'une maladie ou, à un même moment, lorsque plusieurs observateurs mesurent le même phénomène (études de «concordance») ;
• la comparaison de méthodes déterministes (chaos) et stochastiques dans l'analyse de séries temporelles.

Conclusion
L'idée générale de notre programme de recherche est que la poursuite simultanée des deux objectifs (épidémiologique et méthodologique) est synergique : la meilleure connaissance épidémiologique de l'état de santé nécessite l'utilisation et le développement de méthodes performantes dans le champ des sciences de l'information. C 'est orientée par des applications concrètes que la recherche méthodologique peut se développer.

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Cursus

Licence de mathématiques (1966), diplôme d'études approfondies de statistique mathématique (1967), doctorat d'état ès sciences de l'université Paris VII (1974).
Ingénieur du génie maritime à sa sortie de l'Ecole Polytechnique (1965-1966).
Chargé de recherche (1966-1976), puis maître de recherche à l'Inserm (1976-1981) dans l'unité Inserm 21 de recherches de statistiques.
Professeur à l'université Paris VII (1981-1991), puis professeur des universités - praticien hospitalier, à l'université Pierre et Marie Curie et l'hôpital Saint-Antoine depuis 1991.
Responsable des DEA de biomathématiques, universités Paris VII (1980-1995) et Paris VI (1991-1995).
Directeur de l'Ecole doctorale « Santé publique et sciences de l'information biomédicale » des universités Pierre et Marie Curie et Denis Diderot depuis 1999.
Directeur de l'unité de recherche Inserm 263 « Biomathématiques et biostatistiques » (1982-1995).
Directeur du service commun de l'Inserm « Centre coopérateur de données sur l'épidémiologie de l'immunodéficience humaine » (1988-1991).
Directeur de l'unité de recherche Inserm 444 « Épidémiologie et sciences de l'information » (1996-2004).

Instances scientifiques et d'administration de la recherche

Membre de la commission scientifique spécialisée de l'Inserm « Santé publique, santé mentale, épidémiologie, environnement et écologie, biomathématiques, génie biologique et médical, économie de la santé » (1983-1986).
Président des conseils scientifiques du Réseau national de santé publique (1993-1998) et de la faculté de médecine Saint-Antoine (1994-1998).
Membre du conseil d'administration de l'Agence française du sang (1996 - 2000), du conseil d'administration de l'lnserm (1997-2000).
Membre du conseil scientifique de l'Inserm (1999-2002).
Membre du conseil d'administration de l'Institut national de veille sanitaire (2000-2004), président du conseil d'administration de l'Institut national de la transfusion sanguine depuis 2007.

Sociétés savantes - Académies

Membre de la Biometric Society (1966-), de l'Association des épidémiologistes de langue française (1987-), de l'International AIDS Society (1987-), de l'American Medical lnformatics Association (1991-), de l'American Public Health Association (2004-), de l'International Society for Syndromic Surveillance (2005-).
Correspondant (1999), puis membre (2004) de l'Académie des sciences 'Äì Institut de France. Délégué de la section de Biologie humaine et sciences médicales de cette académie depuis 2006.

Activités éditoriales

Editeur associé et/ou membre du comité de rédaction de BMC Infectious Diseases, Health Threats et Influenza & other Respiratory Viruses.

Prix - Distinctions

Grand Prix Claude Bernard de la recherche médicale de la Ville de Paris (1995), prix de la recherche en santé publique de l'Institut des sciences de la santé (2003).
Grand prix de la Fondation pour la recherche médicale (2005).
Officier des Palmes académiques (1990), Chevalier dans l'ordre de la Légion d'honneur (2006).

Travaux scientifiques

Tout au long de sa carrière scientifique, Alain-Jacques Valleron a travaillé à l'interface des sciences de l'information et la biomédecine. Dans la première partie de sa carrière, ses recherches ont conduit à la création d'une plate forme de simulation du cycle et de la cinétique cellulaires qui lui a permis, notamment, de cartographier la variabilité des durées des phases du cycle cellulaire dans de nombreux systèmes expérimentaux (in vivo et in vitro) et humains, et de modéliser les conséquences de cette variabilité en termes de mise au point de traitements séquentiels en chimiothérapie ou radiothérapie. La seconde partie de sa carrière, à partir des années 1980, a été consacrée au développement de systèmes d'informations et de modèles statistiques ou informatiques permettant de décrire, de modéliser, de détecter en temps réel et de prévoir la dynamique d'épidémies, notamment de maladies émergentes. Les maladies concernées ont été en particulier la grippe et les maladies transmissibles fréquentes de l'enfant, le sida et les hépatites virales, la maladie de Creutzfeldt Jakob, le SARS (Severe Acute Respiratory Syndrome)...

Sélection de publications

- Valleron AJ, Frindel E. Computer simulation of growing population of cells. Cell and Tissue Kinetics [now: Cell - Proliferation] 6 : 69-79, 1973.
- Valleron AJ, Eschwege E, Papoz P, Rosselin GE. Agreement and discrepancy in the evaluation of normal and diabetic oral glucose tolerance test. Diabetes 24: 585-93, 1975.
- Koscielny S, Tubiana M, Valleron AJ. A simulation model of the natural history of human breast cancer. Br J Cancer 52: 515-24, 1985.
- Valleron AJ, Bouvet E, Garnerin PH, Menares J, Heard I, Letrait S, Lefaucheux J. A computer network for the surveillance of communicable diseases. The French experiment. Am J Public Health 76: 1289-92, 1986.
- Costagliola D, Mary JY, Brouard N, Laporte A, Valleron AJ. Incubation time for AIDS from the French transfusion-associated cases. Nature 338 : 768-9, 1989.
- Flahault A, Valleron AJ. HIV and travel, no rationale for restrictions. Lancet 336: 1197-8, 1990.
- Carrat F, Valleron AJ. Epidemiologic mapping using the "kriging" method: application to an influenza-like illness epidemic in France. Am J Epidemiol 135 : 1293-1300, 1992.
- Laurier D, Guiguet M, Chau NP, Wells JA, Valleron AJ. Prevalence of obesity: a comparative survey in France, the United Kingdom and the United States. Int J Obes Relat Metab Disord 16: 565-72, 1992.
- Le Pont F, Costagliola D, Rouzioux C, Valleron AJ. How much would the safety of blood transfusion be improved by including p24 antigen in the battery of tests? Transfusion 35, 542-7, 1995.
- Rouzioux C, Costagliola D, Burgard M, Blanche S, Mayaud M-J, Griscelli C, Valleron AJ. Estimated timing of mother-to-child HIV-1 transmission by use of a Markov model. Am J Epidemiol 142, 1330-7, 1995.
- Sebille V, Chevret S, Valleron AJ. Modeling the spread of resistant nosocomial pathogens in an Intensive-Care Unit Infect. Cont Hosp Epidemiol 18 : 84-92, 1997.
- Deuffic S, Poynard T, Buffat L, Valleron AJ. Trends in primary liver cancer. Lancet 351: 214-5, 1998.
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