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Patrice Pinell est né le 2 décembre 1944 à Paris. Il a mené ses études secondaires au lycée Condorcet à Paris et ses études supérieures aux facultés de médecine et des sciences de Paris

Voir un entretien avec Patrice Pinell (2002, J-F Picard)

Maîtrise de biochimie (1968), Diplôme d’études approfondies en biochimie (1969).
Docteur en médecine (1972).
En 1971, il intègre l’Inserm, en tant qu’attaché de recherche dans l’unité Inserm 96 « Glande thyroïde et régulation hormonale » dirigée par Jacques Nunez au Kremlin-Bicêtre.
Il commence à s’intéresser à la sociologie et en 1975 rejoint transitoirement l’unité 30 de l’Inserm « Maladies du métabolisme chez l’enfant » dirigée par Pierre Royer, pour participer l’année suivante à la création de l’unité 158 « Recherches psychanalytiques et sociologiques en santé publique ») dirigée par Ginette Rimbault.
Chargé de recherche Inserm (1979), directeur de recherche de 2° classe (1987), directeur de recherche de 1e classe (1996).
En 1986, il est nommé directeur de l’unité 158 dont l’intitulé devient « Savoirs et pratiques dans le champ médical, histoire, sociologie, psychanalyse » (1986-1999).
En 2000, après son troisième mandat de directeur d’unité, il rejoint le Centre de sociologie européenne, unité mixte de recherche CNRS 8035/ Ecole des hautes études en sciences sociales et y anime une équipe « sociologie du champ médical » et un atelier de recherche.

Instances scientifiques

Membre du conseil scientifique de l’Inserm (1983-1986), membre de la commission scientifique spécialisée de l’Inserm « Epidémiologie, santé publique, sciences sociales, environnement, toxicomanie » 1987-1990), membre de l’intercommission Inserm « Handicap » (1989-1991).
Membre de la commission scientifique Sciences humaines et sociales de l’Anrs (1994-1997), de la section 36 (sociologie, droit) du comité national du CNRS (2004-2008), du conseil scientifique du département de sciences humaines et sociales de l’Institut national du cancer, du comité d’évaluation des PHRC Cancer depuis 2006, du comité d’évaluation des cancéropôles (au titre des sciences humaines et sociales).
Membre associé au conseil de rédaction de la revue Actes de la recherche en sciences sociales, membre du conseil scientifique de la revue Sociologie Santé (depuis 2003).

Travaux scientifiques

Depuis l’année 1976, Patrice Pinell a mené des recherches sociologiques, principalement sur six grands thèmes :
- analyse socio-historique de la médicalisation des échecs scolaires et construction du secteur médico-psycho-pédagogique en France,
- sociologie des toxicomanies,
- la lutte contre le cancer et les transformations du champ médical français (1890-1940)
- histoire des myopathies,
- analyse socio-historique de la lutte contre le sida en France (1981-1996),
- sociologie historique du processus de spécialisation de la médecine française.
Il s’est agi pour Patrice Pinell, par-delà la diversité des objets traités, de rendre compte de la genèse d’un problème médical, de sa traduction institutionnelle et de la dynamique de son évolution. Ce qui a conduit celui-ci à étudier des processus courant sur des périodes historiques plus ou moins longues (en fonction de la question traitée), de l’ordre du siècle ou de la décennie. Adopter un tel type de posture méthodologique impose de se plier à des contraintes, mais qui confèrent au travail de recherche, une bonne part de son intérêt et de sa richesse. En effet, analyser l’évolution historique d’un problème (quel qu’il soit) suppose d’analyser solidairement le contexte dans lequel il apparaît et l’évolution de ce même contexte. De ce fait, l’objet de recherche, aussi circonscrit soit-il, devient un analyseur des transformations du champ médical et plus largement du monde social. Dans ces conditions, l’addition des thèmes de recherche produit un effet cumulatif en termes de connaissance qui dépasse cette addition proprement dite. En travaillant sur la constitution et l’évolution de différents espaces spécialisés (secteur médico-pédagogique, institutions pour toxicomanes, lutte contre le cancer, ou lutte contre le sida), Patrice Pinell a pu (et a dû, parce que cela était nécessaire) accumuler des connaissances d’ordre général sur le champ médical (le pôle hospitalo-universitaire, la médecine libérale) et d’autres univers sociaux en rapport avec les thèmes étudiés (l’institution scolaire, le champ politique, le champ du travail social, le champ juridique, différentes disciplines scientifiques etc).


Unité de recherche Inserm 158 « Savoir et pratiques dans le champ médical,
histoire, sociologie, psychanalyse »

Ginette Raimbault est à l’origine de la création de l’unité 158 « Systèmes relationnels autour de l’enfant malade » en 1976 à l’hôpital Necker – Enfants malades. En octobre 1983, l’intitulé devient « Recherches psychanalytiques et sociologiques en santé publique ». Ginette Raimbault dirigera cette unité jusqu’au 31 décembre 1986.
Patrice Pinell lui succède en 1987 et l’intitulé de l’unité devient « Savoir et pratiques dans le champ médical, histoire, sociologie, psychanalyse ». En 1999 l’unité sera fermée.
Deux approches différentes ont marqué chacune des deux directions. L’une psychanalytique autour de Ginette Raimbault, l’autre sociologique autour de Patrice Pinell.
Ginette Raimbault a abordé deux thèmes principaux : l’étude de l’enfant malade et de son développement psycho-affectif ; l’étude des systèmes relationnels autour de l’enfant malade dans trois domaines précis (malades porteurs d’affections rénales chroniques, enfants affectés de nanisme, d’anorexie mentale).
Patrice Pinell, quant à lui, a travaillé sur trois thèmes principaux, le cancer, le sida et les maladies génétiques, dans une approche sociologique.

Chronologie des recherches et des événements de l’unité

En 1976, l’unité 158 est créée par scission de l’unité de recherche Inserm 30, « Maladies du métabolisme chez l’enfant », dirigée par le Professeur Pierre Royer.
En 1978, les thèmes de recherche étaient les suivants : aspects psychologiques de la transplantation rénale chez l’enfant ; problèmes psychologiques de la nutrition artificielle chez les enfants porteurs d’entéropathies graves ou ayant subi une résection digestive étendue ; déterminants psychologiques fondamentaux dans la relation de l’enfant à la maladie ; aspects psychologiques du diagnostic prénatal précoce ; valeur de l’information médicale donnée aux diabétiques et son influence dans le contrôle et l’acceptation de la maladie ; facteurs psychologiques à l’origine des nanismes psychosociaux ; origine sociologique de certaines débilités.
Du rapport d’évaluation de I’unité menée par Stanislas Tomkiewicz, directeur de l’unité de recherche lnserm 29 « Santé mentale et déviance de l’enfant et de l’adolescent », en 1979, il ressortira que : « l’orientation psychanalytique signifie ici plutôt un mode d’approche qui permet de saisir l’enfant comme personne humaine entière dotée de désirs conscients et inconscients, ayant de son corps sain ou malade une vision toute autre que celle des anatomistes et des biochimistes et ayant une façon spécifique de répondre à ce que veut, désire, pense, propose et fait pour lui et avec lui la famille, le personnel paramédical et les médecins. »
En 1980, un centre de consultations gratuites de psychanalyses est ouvert au sein de l’unité, le « Centre de recherche psychanalytique », à I’hôpital des enfants malades - clinique Robert Debré, autour de Caroline Eliacheff, Elisabeth Levy-Leblond, Ginette Raimbault, Danielle Silvestre,.
En 1981, les recherches de l’unité sont : psychopathologie de l’enfant et de l’adolescent (toxicomanie, tentative de suicide,...) ; méthodes et résultats des psychothérapies d’enfants ; étude psychologique des relations de l’enfant malade (nanisme, diabète, nutrition artificielle, ...) ; travail d’analyse descriptive et démarche inductive.
En 1982, les recherches s’orientent : 1) sur la psychologie et la psychopathologie de la vie quotidienne, avec l’étude de la représentation de la fonction paternelle au cours de la première année de vie de l’enfant ; 2) sur étude de l’approche psychologique de la sexualité des adolescents et des tentatives de suicide des adolescents ; 3) sur le retentissement psychologique de l’enfant confronté à l’institution hospitalière et à des technologies médicales de pointe, qu’il s’agisse de maladies héréditaires, de diabète infantile, de l’hypospadias (malformation de l’urètre de l’homme), de problèmes dérivant d’une nutrition artificielle chronique, ou de la « castration » résultant de la chimiothérapie chez des adolescentes ; 4) sur la psychosociologie de l’échec scolaire des enfants et adolescents de petite taille et des handicapés de l’intelligence.
En 1983, de nouveaux thèmes de recherches sont abordés : psychanalyse et argent, maladies organiques chez l’adolescent, l’eugénisme dans la génétique contemporaine, les représentations sociales du cancer...
En 1986, deux axes : questions touchant à la façon dont les formations sociales, les groupes, les individus se rendent intelligibles les maladies et cherchent à donner du sens à leur survenue ; étude de l’hôpital comme espace social de soin et de prise en charge.
Les thèmes de recherche transversaux à ces axes sont les suivants : 1) la maladie somatique comme objet de représentation sociale et enjeu de lutte des classes, objet du discours ; 2) maladie somatique et structure psychique du sujet ; 3) conditionnement de l’institution hospitalière ; 4) les innovations en médecine, sous l’enjeu de leurs conditions de production et de leurs conséquences (modification des pratiques sociales, retentissement psychologique, problèmes éthiques) ; 5) les relations soignants-soignés analysées d’un point de vue sociologique comme interactions entre spécialistes et non-spécialistes et, d’un point de vue psychanalytique, le rôle de la pathologie, la volonté psychique du sujet et le symbolisme introduit par le fonctionnement de la médecine.
En 1987, Patrice Pinell succède à Ginette Raimbault et, en 1989, l’unité est affiliée au CNRS, et Jacques Maître, sociologue chercheur au CNRS, rejoint l’unité.
Celle-ci est constituée de trois grandes équipes : psychanalyse et médecine, sciences sociales, biologie et médecine, cultures, symptômes et maladies (équipe issue de la fermeture de l’unité de recherche Inserm 164, dirigée par Françoise Hatton « Evaluation de l’état de santé et des systèmes de soins et de prévention »)
En 1994, les recherches vont se structurer autour de trois axes principaux : les deux premiers traitant de la genèse de la médecine moderne et de son évolution jusqu’à la période contemporaine, par une approche historique et sociologique ; le troisième traitant des travaux de recherches psychanalytiques conduits en milieu hospitalier.
? Production des connaissances et des pratiques médicales. De la fin du XVIIIème à nos jours, autour d’une dimension épistémologique centrale qui est de comprendre comment s’élaborent, évoluent, se transforment les connaissances (maladie, vivant) et les pratiques (cliniques, recherche fondamentale, épistémologie) constitutives du domaine médical, sachant que leur production est : pour une part déterminée par les problèmes d’articulation entre différents modes d’approches de la maladie (anatomoclinique, biologique, épidémiologique) dont la complémentarité n’est jamais posée a priori ; marquée par le fait qu’elle s’inscrit dans un processus social de division du travail savant, dont la dynamique d’évolution se traduit par une tendance à la constitution de domaines spécialisés.
L’analyse de ces traits caractéristiques de la médecine moderne donne la trame des différentes recherches, que celles-ci soient centrées sur l’histoire d’une spécialité clinique, d’une discipline biomédicale, d’un domaine nouveau en voie de constitution à l’interface de plusieurs disciplines, ou qu’elles traitent, sur un objet particulier, des rapports entre science, clinique, épidémiologie et, plus largement, médecine en santé publique.
? Développement de la médecine en tant que facteur de transformations (culturelles, sociales, politiques) du monde social. L’axe central des recherches est l’étude des processus de médicalisation tel qu’on peut le saisir à travers : l’analyse des discours et des pratiques relevant de la prévention, du dépistage et de la prise en charge ; l’analyse de réseaux institutionnels par lesquels s’opèrent les médiations entre différents groupes d’agents (chercheurs, médecins, philanthropes, politiques, usagers de la santé, malades) impliqués dans des associations de lutte contre la maladie ; l’analyse des rapports entre pratiques de lutte contre la maladie et structuration des professions de santé.
? Travaux de recherches psychanalytiques conduits en milieu hospitalier : maladies somatiques et leurs conséquences en termes de handicaps ; connaissances médicales délivrées aux patients ; modalités de traitements et de prises en charges étudiées sous l’angle de leurs incidences psychologiques et relationnelles.
Deux grands domaines de recherche qui sont le sida et les maladies génétiques, faisait l’objet de recherches menées dans ces trois approches.
Principaux articles

- Pinell P. L’école obligatoire et les recherches en psychopédagogie au début du XXe siècle. Cahiers internationaux de sociologie 63 : 341-62, 1977.
- Pinell P, Zafiropoulos M. La médicalisation de l’échec scolaire. De la pédopsychiatrie à la psychanalyse infantile. Actes de la recherche en sciences sociales 24 : 23-49, 1978.
- Zafiropoulos M, Pinell P. Drogues, déclassement et stratégies de disqualification. Actes de la recherche en sciences sociales 42 : 61-75, 1982.
- Guerrieri R, Pinell P. Expériences des drogués et positions institutionnelles. Sciences sociales et santé. 11 : 39-65, 1984.
- Guerrieri R, Pinell P. Aspetti sociologici dell’intervento terapeutico-reabilitativo per i tossico-dipendenti in Francia. Affari sociali internazionali 1 : 31-55, 1985.
- Pinell P. Le paradis perdu. Actes de la recherche en sciences sociales 62-63 : 100-4, 1986.
- Pinell P. How do cancer patients express their points of view? Sociology of Health & Illness 9: 25-44, 1987.
- Pinell P. Fléau moderne et médecine d’avenir : la cancérologie française entre les deux guerres. Actes de la recherche en sciences sociales 68 : 45-76, 1987.
- Pinell P, Brossat S. The birth of cancer policies in France. Sociology of Health & Illness 10: 579-607, 1988.
- Brossat S, Pinell P. Coping with parents, Sociology of Health & Illness 12(1), 69-83, 1990.
- Pinell P. Cancer policy and the health system in France : “ big medicine ” challenges the conception and organization of medical practice, Social history of medicine, 1991, 4(1): 75-101.
- Pinell P, Steffen M. Les médecins français : genèse historique d’une profession divisée. Espace social européen 258 : 41-55, 1994.
- Pinell P. L’invention de l’échelle métrique de l’intelligence. Actes de la recherche en sciences sociales 108 : 19-35, 1995.
- Pinell P. Modern medicine and the civilizing process. Sociology of Health & Illness 18: 1-16, 1996.
- Pinell P. Incurabilité et genèse de l'idée de rémission. Frontières 11 : 6-9, 1998-1999.
- Pinell P. Du patient à l'acteur : le malade et la division du savoir médical. Environnement & société 23: 65-73, 1999.
- Rosenbrock R, Dubois-Arber F, Moers M, Pinell P, Schaeffer D, Setbon M. The normalisation of AIDS in Western European countries. Social Science & Medicine 50: 1607-29, 2000.
- Pinell P. Champ médical et processus de spécialisation. Actes de la Recherche en Sciences Sociales 156-157 : 4-36, 2005.
- Pinell P. La normalisation de la psychiatrie française. Regards Sociologiques 29 : 3-21, 2005.

Chapitres d’ouvrages collectifs

- Pinell P. Scientific medicine of cancer and new schemata of thought. In Löwy I, Ed. L’innovation en médecine : études historiques et sociologiques. Editions Inserm/John Libbey, Paris, 1993, p361-369.
- De Busscher PO, Pinell P. La création des associations de lutte contre le Sida. In Serge Hefez, Ed. Sida et vie psychique. La Découverte, Paris, 1996, p316-23.
- Pinell P. Cancer. In Cooter R, Pickstone J, Eds. Medicine in the 20 TH Century. Harwood academic publishers, 2000, p671-686.
- Pinell P. Degeneration theory and heredity patterns between 1850 and 1900. In Gaudillière JP, Löwy I, Eds. Heredity and infection. The history of disease transmission. Routledge, London and New York, 2001, p245-260.
- Pinell P. Dictionnaire de la pensée médicale, sous la direction de Lecourt D. Comité scientifique : Delaporte F, - - Pinell P, Sinding C. Presses Universitaires de France, Paris, 2004, 1 290 p.

Ouvrages

- Pinell P, Zafiropoulos M. Un siècle d’échecs scolaires (1882-1992). Les éditions ouvrières, Paris, 1983, 198p.
- Pinell P. Naissance d’un fléau. Histoire de la lutte contre le cancer en France (1890-1940). AM Métailié, Paris, 1992, 367p.
- Delaporte F, Pinell P. Histoire des myopathies. Bibliothèque Scientifique Payot, Payot, Paris, 1998, 274p.
- Pinell P, Broqua C, de Busscher PO, Jauffret M, Thiaudière C. Une épidémie politique. La lutte contre le sida en France, 1981-1996. Presses Universitaires de France, Paris, 2002, 418p.
- Pinell P. The fight against cancer. France (1890-1940). Routledge, London and New York, 2002, 243p.